La ministre des Pensions Karine Lalieux (PS) a divulgué en novembre 2020 sa déclaration de politique générale et sa note de politique générale. Elle y explique en détail comment elle veut réaliser concrètement cette année l’accord de gouvernement dans le domaine des pensions. Et elle est pressée. Le 1er septembre déjà elle présentera au conseil des ministres une proposition concrète de réforme des pensions.
Nous sommes positifs car elle veut collaborer avec les partenaires sociaux. Dans chaque réforme, elle a recours au critère du genre, elle veut rehausser les montants des pensions, elle garantit de respecter les droits acquis et elle réintroduit le bonus de pension.
Mais nous sommes aussi préoccupés. La ministre maintient toutes les mesures rigoureuses prises précédemment en vue de faire travailler les gens plus longtemps, elle instaure la pension à temps partiel, elle œuvre à une harmonisation des régimes de pensions (vers le bas ?) et surtout, elle ne prévoit dans sa note aucune mesure visant à la possibilité d’une pension anticipée. La pension complémentaire du personnel contractuel du secteur public a apparemment échappé à son attention. La pension pour maladie risque d’être supprimée. Le budget est en effet, hélas, son autre fil rouge.
Métiers pénibles
La seule compensation dans le détricotage des pensions par les gouvernements précédents résidait dans la réglementation des métiers pénibles. Elle a disparu de son agenda. Travailler plus longtemps reste au premier plan, sans possibilité de prendre une pension anticipée : pour le SLFP, c’est hors de question. Nous gardons malgré tout une petite lueur d’espoir, maintenant que la ministre a annoncé dans la presse qu’une fin de carrière anticipée avec la réglementation des métiers pénibles viendra tout de même sur la table des négociations. Le SLFP lui fera tenir parole !
La ministre de la Défense Dedonder (PS) a déclardans la presse qu’on ne toucherait pas à l’âge de la pension des militaires. C’est aussi réjouissant pour le SLFP.
Une pension convenable et des économies
La ministre des Pensions garantit une pension convenable. En même temps, elle maîtrisera le coût du vieillissement. Ces objectifs sont contradictoires. Travailler plus longtemps reste la norme.
Le SLFP soutient l’idée d’une pension valable et convenable, mais il veut la garantie que les montants des pensions ne seront pas harmonisés vers le bas, que les diverses mesures de fin de carrière actuelles restent garanties dans le secteur public, et une fin anticipée des carrières (pénibles) : la réglementation des métiers pénibles.
Quelles garanties ?
La ministre Lalieux promet un débat avec les partenaires sociaux sur la réforme des pensions imminente. Elle ne touche pas aux droits de ceux qui sont actuellement pensionnés. Elle promet de respecter tous les droits à la pension déjà constitués pour les fonctionnaires.
Le SLFP plaide pour le maintien des droits acquis pour les années prestées, au moins jusqu’au moment de la réforme. Il importe de maintenir au moment de la réforme les tantièmes spéciaux pour les années prestées sous ces fractions de carrière. Pour le SLFP, c’est un point particulièrement sensible.
De plus, elle garantit les mesures transitoires nécessaires. Elle veut aussi réduire autant que possible les inégalités homme-femme dans les mesures relatives aux pensions.
Quelles réformes concrètement ?
Travailler plus longtemps pour une pension supérieure
La ministre étudie le paysage des fins de carrière, dans lequel se situe la pension à temps partiel, à propos de laquelle le SLFP a déjà indiqué que c’était hors de question. Elle veut stimuler les gens à travailler plus longtemps en réintroduisant le bonus de pension.
Elle veut améliorer le pouvoir d’achat des pensionnés. En même temps, elle lie le droit à une pension minimum à une carrière de 30 ans et à un degré d’emploi « effectif ». Cette règle vise les femmes ayant une carrière incomplète. Les carrières mixtes (p.ex. combinaison salarié et fonctionnaire) seront bien prises en compte. La ministre majore la pension minimum dans tous les régimes de pensions, à partir du 1er janvier 2021 pour atteindre en 2024 une majoration de 11%, avec pour but 1.500 euros nets de pension pour une carrière complète.
La ministre veut organiser la solidarité entre les pensions les plus élevées et les plus basses.
L’accord de gouvernement fait état d’une harmonisation concrète des trois régimes de pensions, salariés, indépendants et fonctionnaires pour la fin 2021. Dans la note de politique générale, la ministre ne parle, heureusement, que de « ne pas laisser s’accroître » les différences entre les régimes.
Le SLFP se montre vigilant quant à la « convergence » des régimes de pensions qui s’annonce. La pension du secteur public doit tenir lieu de norme pour les autres régimes, dans la négative le personnel du secteur public sera le dindon de la farce vu que les statutaires n’ont pas de pension complémentaire.
Il semble que la ministre ne dispose pas d’un plan spécifique pour garantir à l’ensemble du personnel contractuel du secteur public une généralisation de la pension complémentaire à minimum 3% du salaire brut. Alors que pour le secteur privé, c’est bel et bien à l’ordre du jour.
Le SLFP interrogera la ministre à ce propos. De plus, le SLFP œuvre pour que toutes les autorités, et les entreprises publiques, contribuent à un plan de pension complémentaire en faveur de leurs personnels.
Qu’en est-il de la pension pour maladie ?
L’évaluation projetée de la pension pour maladie des fonctionnaires en incapacité de travail nous cause de grands soucis.
La ministre des Pensions veut aligner la pension pour maladie sur la réglementation du privé en matière d’incapacité de travail et les parcours de réintégration qui y sont liés. Cela signifie donc la suppression de la pension pour raison médicale.
Dans les administrations locales nous devons malheureusement constater que le système de réintégration est utilisé surtout pour licencier du personnel contractuel. Ce ne peut être l’effet pervers d’une politique axée précisément sur la remise au travail. Ici, nous remplirons pleinement notre rôle.
Genre et réforme des pensions
Les femmes ont habituellement une carrière plus courte, un salaire inférieur, occupent des fonctions subalternes, travaillent plus souvent à temps partiel. L’effet s’en fait ressentir non seulement par des salaires plus bas, mais aussi par des montants de pension inférieurs. La moitié des femmes a une pension légale mensuelle qui, en moyenne sur les trois régimes de pensions, est inférieure à 1.191,3 euros. La durée de carrière est un paramètre important dans la constitution de la pension.
Une carrière d’au moins 30 ans et une condition d’emploi effectif donnent droit à la pension minimum. Pour beaucoup de femmes, c’est inatteignable. Une option possible pour gommer les inégalités pourrait être de considérer les membres du personnel qui travaillent à temps partiel comme travaillant à temps plein pour le calcul de leur pension.
La constitution d’un bonus de pension n’est possible qu’à partir du moment où l’on satisfait aux conditions pour prendre une pension anticipée. Vu que les femmes satisfont moins rapidement à ces conditions, elles pourront donc constituer ce bonus moins rapidement. Ici aussi, il est question de discrimination.
La ministre des Pensions Lalieux : « L’écart entre la pension des hommes et des femmes s’élève à 26 % en Belgique. C’est pourquoi il est essentiel d’investir dans le gommage des différences entre les hommes et les femmes sur le marché du travail. Chaque mesure sera soumise au test genre. »
Le SLFP-Gender compte bien que la ministre Lalieux joindra le geste à la parole et qu’elle n’en restera pas à un vain engagement pour réduire cette inégalité.
Photo Karine Lalieux - © Belgaimage