Le rapport annuel du comité sur le vieillissement apporte un nouvel éclairage sur les mesures en matière de pensions prévues dans l’accord de gouvernement. Les économies drastiques ont un coût social : le taux de remplacement des pensions des fonctionnaires baisse de près de 12 %, tandis que l’écart de pension entre hommes et femmes s’accentue. Et ce, alors que le Bureau du Plan n’a même pas encore chiffré l’impact sur la pauvreté future. De plus, la charge n’est pas répartie équitablement entre les régimes. Ce sont surtout les fonctionnaires et les salariés qui subissent les mesures, tandis que les indépendants restent quasi épargnés.
Le taux de remplacement des pensions correspond au rapport entre la pension moyenne de l’ensemble des retraités et le revenu professionnel moyen de la population active. Cet indicateur diminue fortement à cause des réformes : de 11,9 % pour les fonctionnaires et de 9,2 % pour les salariés d’ici 2070. Pour les indépendants, la baisse reste limitée à 3,1 %.
Économies sur le dos des fonctionnaires
Comme chaque année, le Comité d’étude sur le vieillissement évalue les conséquences budgétaires et sociales du vieillissement. Cette année, une attention particulière a été portée aux réformes des pensions prévues dans l’accord de gouvernement fédéral. L’impact budgétaire illustre l’ampleur de l’opération d’économies : à l’horizon 2070, il s’agit d’une réduction de 1,8 point de pourcentage du PIB, soit plus de 10 milliards d’euros en valeur actuelle. La facture est presque entièrement supportée par les fonctionnaires et les salariés. Près de la moitié des économies repose sur le dos du personnel de la fonction publique, contre à peine 5 % pour le régime des indépendants. L’abolition des tantièmes préférentiels et des âges de pension spécifiques pèse lourdement dans cette logique d’austérité. Il n'est absolument pas question d’une répartition juste et équitable.
Moins de pouvoir d’achat
C’est cependant l’impact social qui interpelle le plus. Le taux de remplacement des pensions des fonctionnaires diminue de 9,9 % d’ici 2040 et même de 11,9 % en 2070. Bien que les fonctionnaires bénéficient aujourd’hui en moyenne d’une pension légale plus élevée que celle des salariés, leur régime est également fortement fragilisé. La baisse du taux de remplacement signifie que, dans le futur, les fonctionnaires conserveront une part beaucoup plus réduite de leur revenu antérieur. L’écart entre le salaire en période d’activité et la pension continuera donc de se creuser. Cela s’explique notamment par le fait que – progressivement – la pension sera calculée sur base de la rémunération de 45 années de carrière, au lieu du salaire (souvent plus élevé) des dix dernières années. Autrement dit, les pensions offriront à l’avenir bien moins de pouvoir d’achat pour les fonctionnaires et les salariés, tandis que les indépendants seront à peine touchés.
Comme pour les salariés, cela démontre que les pensions légales belges, malgré leur rôle essentiel comme source principale de revenu après la retraite, deviennent de moins en moins suffisantes par rapport aux moyennes européennes. Chez nous, la pension représente en moyenne 48 % du revenu antérieur, alors que la moyenne européenne atteint 61 %.
Un autre fil rouge : les mesures ciblent les femmes
Dans le régime des fonctionnaires également, l’écart de pension entre hommes et femmes continue de se creuser. Les réformes frappent de manière disproportionnée les femmes fonctionnaires, qui connaissent plus souvent des carrières interrompues pour cause de soins ou de travail à temps partiel. Pour elles, il devient beaucoup plus difficile de remplir les nouvelles conditions de carrière plus strictes imposées par le gouvernement. Le malus instauré dans le calcul des pensions touchent donc en premier lieu les femmes. La conclusion du comité est sans appel : ces malus aggravent l’écart de pension entre hommes et femmes dans les trois régimes de pension.
Alors que le gouvernement veut économiser plus de 10 milliards d’euros d’ici 2070, le rapport ne chiffre pas l’impact des mesures sur le risque de pauvreté des futurs retraités. C’est inacceptable. Lorsqu’on impose de telles mesures drastiques et déséquilibrées, on ne peut pas balayer sous le tapis leurs conséquences sociales.
Les organisations syndicales demandent une analyse approfondie de l’impact, qui prenne également en compte les effets sur la pauvreté. Les chiffres connus démontrent que la réforme des pensions telle qu’elle est envisagée accentue l’écart entre hommes et femmes et met en péril le maintien du niveau de vie et la capacité financière des pensionnés.
Pour le SLFP, les pensions des fonctionnaires ne sont pas trop élevées aujourd’hui, ce sont celles des salariés qui restent trop faibles. Pourtant, le gouvernement ARIZONA taille dans toutes les pensions : une économie impitoyable. Pour les décideurs politiques, il ne s’agit que de chiffres ; pour le SLFP, il s’agit de personnes. Un monde de différence.
Rapport du Comité d'étude